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Les barycentres

Ce petit cours de maths reprend les principales notions sur les barycentres : principes de base, formules, etc. avec bien entendu quelques exemples concrets.

N.B. : Il est fortement conseillé d'avoir lu les chapitres sur les droites et les vecteurs avant d'aborder cette partie.

Un peu d'histoire

  • Bien avant les Égyptiens, on connaissait déjà le principe du bras de levier pour soulever de lourdes charges : soit A et B les extrémités du levier employé, et O le point d'applicaton du levier, à la force perpendiculaire appliquée au point B, vient s'opposer une force perpendiculaire au point A, mais de sens opposé, suivant l'égalité || F A || . OA = || F B || . OB .
  • Du point de vue physique, multiplier une force F (en Newton) par une distance OA (en mètre) s'appelle un "moment", et se note M F A / O = OA F .
    Attention : L'opérateur X est ici un produit vectoriel (cf. chapitre des vecteurs). Le vecteur résultant de cet opérateur a un sens, et donc un signe (positif ou négatif suivant le repère d'étude), comme nous le verrons plus loin.

Équilibre des deux moments d'un bras de levier

  • Pour mieux comprendre ce qui se passe, calons le repère orthonormé sur l'origine du repère O comme suit :
  • Nous avons ici deux forces qui tournent autour du point O (pivot) dans le même sens. Les moments produits par ces forces seront alors de même signe.
  • En posant 1 unité de longueur/carreau sur l'axe x, et 1N/carreau sur l'axe y, on obtient OA = 2 unités, OB = 5 unités, || F A || = 5 N et || F B || = 2 N , on obtient 2.5 = 5.2 = 10.
  • Petite remarque «sportive» en passant : vous admirez ici la formidable performance de soulever une charge de 50N (environ 5kg) en A, avec une force exercée en B de 10N (environ 1kg), et ce, sans aucun produit dopant !

Notions de barycentre

  • Tout le monde a un beau jour constaté que le point d'équilibre d'une règle droite se situait approximativement en son milieu, ce qui revient à répartir la même masse de chaque côté du doigt porteur. Si l'on ajoute maintenant une pièce de monnaie à une extrémité, on constate que le centre de gravité de la règle s'est déplacé du côté ou l'on a placé la pièce, et plus on met de pièces, plus le centre d'équilibre est attiré par la masse ajoutée.
  • Modélisons maintenant notre règle en un segment [AB]. Sans aucune pièce posée, les points A et B ne situent normalement à 1/4 et 3/4 de la règle utilisée, mais pour simplifier le problème, nous considérerons ici le poids de la règle comme négligeable devant le poids des pièces.
  • Comme pour le bras de levier précédent, on retrouve ici un équilibre des moments, la force extérieure appliquée étant cette fois ci le seul poids de la règle. Soit G notre point pivot (notre doigt), le poids étant dirigé vers le bas de chaque côté de la règle, le signe des moments sera alors de sens opposé, donc l'égalité de signe opposé. L'équilibre des moments se traduit alors par :
    GA P A = - GB P B GA P A + GB P B = 0 P A GA + P B GB = 0 .
  • Ce petit paragraphe est destiné à ceux qui veulent aller plus loin dans les explications. Si vous débutez, évitez de le lire ou prévoyez quelques aspirines, sinon passer tout de suite à la figure ci-dessous.
    • On considérera ici le point G comme origine du repère, et [G,B) comme axe positif des abscisses. On supposera l'axe des ordonnées dirigé vers le bas.
    • Dans ces conditions, le développement du produit vectoriel ci-dessus aboutit à la relation P A . GA - P B . GB = 0 , avec GA>0 et GB>0. On remarquera évidemment le signe négatif dans l'expression.
    • Prenons maintenant la première formule du barycentre P A . GA + P B . GB = 0 et projettons la sur l'axe x. Le vecteur GA pointant dans le sens négatif de l'axe, nous obtenons P A . -GA + P B . GB = 0 , avec GA>0 et GB>0.
    • On retrouve donc bien la même relation moyennant un simple changement de signe de chaque côté de l'égalité. On peut donc en déduire que la première formule du barycentre n'est qu'une simplification de la formule des moments.
  • Nous pouvons maintenant reprendre une activité (presque) normale...
  • Vous aurez compris le but du jeu : placer des pièces sur notre règle, et essayer de trouver précisément où se trouve le point d'équilibre G. Ce point se trouvant forcément sur la règle, donc quelque part sur le segment [AB], il faut pouvoir le situer précisément. Pour cela, nous utiliserons la seule information dont nous disposons : les points A et B.
  • Si nous fixons le point A comme point de départ, le problème reviendra à rechercher un réel k1 tel que AG = k 1 AB .
  • Si nous fixons le point B comme point de départ, le problème reviendra à rechercher un réel k2 tel que BG = k 2 BA .
  • Choisissons arbitrairement de partir du point A. Plaçons 4 pièces en A et 6 pièces en B (on supposera évidement les pièces de même poids). D'après la règle des moments, on doit avoir 4 GA + 6 GB = 0 . On dit alors que G est le barycentre du système (A,4)(B,6).
  • 4 GA + 6 GB = 0 4 GA + 6 GA + 6 AB = 0 10 GA = -6 AB 10 AG = 6 AB AG = 6 10 AB AG = 3 5 AB
  • Remarque : le barycentre du système (A,4)(B,6) est identique à celui du système (A,2)(B,3) ou à celui du système (A,8)(B,12). Si l'on reprend notre égalité vectorielle de départ 4 GA + 6 GB = 0 , on devine immédiatement pourquoi : multiplier ou diviser les deux côtés de l'égalité par un même réel différent de 0 ne change rien au résultat. Il convient donc, avant de se lancer dans les calculs, de toujours simplifier les poids des barycentres proposés, en utilisant les nombres premiers usuels (1,2,3,5,7,11,13,17,19,...).

Barycentre d'un système complexe

  • Nous venons de voir comment calculer simplement le barycentre d'une règle. Imaginons maintenant l'équerre suivante.
  • Commençons par simplifier cet objet complexe en éléments plus simples à manipuler. Si l'on découpe la surface initiale en petits carrés de même surface auxquels on attribue arbitrairement un poids de 1 unité/carré, on peut regrouper les carrés via des rectangles, dont on sait que le centre de gravité est à l'intersection des diagonales, ceci en n'oubliant pas d'additionner les poids des carrés regroupés.
  • On obtient ainsi le point A, centre de gravité du premier rectangle, et le point B centre de gravité du second, avec des poids respectifs de 2 et 4. Le point G recherché, centre de gravité de l'équerre, est alors le barycentre du système (A;2)(B;4).
  • Comme pour l'exemple précédent de la règle, le système étant réduit à deux points, avec des poids de même signes, le barycentre de l'objet se trouve forcément quelque part sur le segment [AB], ce qui ne signifie pas qu'il se trouve sur l'objet physique pour autant...
  • Pour calculer la position de G, nous partons toujours de l'égalité 2 GA + 4 GB = 0 , soit en simplifiant tout de suite par 2 :
    GA + 2 GB = 0 GA + 2 GA + 2 AB = 0 3 GA = -2 AB 3 AG = 2 AB AG = 2 3 AB
  • Il convient maintenant de trouver les coordonnées de G dans le repère de base, en partant du point A(8;4) connu, auquel on ajoutera 2/3 du vecteur AB . Ce vecteur s'obtient comme toujours avec la logique "point final - point initial" (cf. chapitre des vecteurs), soit AB ( 14 - 8 ; 10 - 4 ) AB ( 6 ; 6 ) , dont nous prenons 2/3, soit (4;4), nous obtenons finalement G(8+4;4+4), soit G(12;8). Je vous laisse maintenant le soin de décider si ce barycentre est encore sur l'objet ou déjà en dehors, mais pensez quand même à dormir la nuit...
  • Remarque : le barycentre ne dépend pas du repère initial choisi. Déplacez le repère de base et refaites simplement les calculs avec les nouvelles coordonnées des points et des vecteurs pour vous en convaincre. Comme pour une règle posée sur un doigt, quelque soit le repère d'origine retenu, votre doigt restera positionné au même endroit. Le phénomène physique n'a rien à voir avec le repère servant à effectuer les calculs.

Les deux formules du barycentre (à retenir)

  • Nous avons jusqu'à maintenant utilisé la première formule du barycentre avec a GA + b GB = 0 . Si nous avions introduit un troisième point C, de poids c, nous aurions eu a GA + b GB + c GC = 0 , et ainsi de suite.
  • La seconde formule du barycentre s'obtient à partir de la première, en introduisant un détour par le point O pour chaque vecteur, et aboutie rapidement à : OG = a OA + b OB + c OC a + b + c pour trois points. G est alors le barycentre du système (A,a)(B,b)(C,c).
  • Nous pouvons rapidement vérifier cette seconde formule en reprenons l'exemple de notre équerre. La formule devient alors :
    OG = 2 OA + 4 OB 2 + 4 = OA + 2 OB 3
    Projettons cette égalité vectorielle sur les axes x et y de notre repère :
    • { x G = 1 3 ( x A + 2 x B ) = 1 3 ( 8 + 2 . 14 ) = 12 y G = 1 3 ( y A + 2 y B ) = 1 3 ( 4 + 2 . 10 ) = 8 .
    On retrouve bien les coordonnées de G(12;8) déjà calculées ! (ouf)
  • Remarques :
    • Il est évident que si les poids s'annulent (soit ici a+b+c=0), tout calcul devient impossible.
    • La seconde formule fait également apparaître des pourcentages quand les poids sont de même signe, car a a + b + c , b a + b + c , et c a + b + c sont forcément des nombres compris entre 0 et 1. On dit alors que chaque poids participe au calcul à hauteur d'un certain pourcentage.
    • on parle d'isobarycentre quand tous les poids du barycentre calculé sont de même valeur, ce qui revient à fixer à 1 les poids respectifs dans les calculs. Pour un triangle ABC par exemple, le centre de gravité, situé aux 2/3 des médianes, est un isobarycentre.

Des poids négatifs ?! (welcome to Freud)

  • Jusqu'à présent, nous avons utilisé des poids positifs pour faire le parallèle avec le monde merveilleux des règles et des équerres. Quand tous les poids sont négatifs, il suffit de les multiplier par -1 pour quitter le côté obscur de la force.
  • Mais la notion de barycentre va plus loin, car elle permet de mélanger des poids "positifs" et "négatifs" (pourquoi faire simple ?). Pour reprendre l'exemple de notre règle de départ, le barycentre peut alors sortir du segment [AB], et se ballader sur la droite (AB). Dans ce cas, il faut également oublier les notions de pourcentages de participation au calcul qui n'ont plus lieu d'être du point de vue physique. Les formules de base restent cependant les mêmes.

Conclusion

  • Sans le savoir, nous avons tous un jour calculé des barycentres à l'insu de notre plein gré en calculant une moyenne, qui est un simple barycentre à poids positifs. Plus largement, en statistiques, une bonne partie des formules de base reposent sur cet outil.
  • Au delà des calculs, là où les mathématiques fixent le centre de gravité théorique d'un objet, la physique ne suit pas toujours, comme nous avons pu le constater avec notre équerre. Cela peut paraître curieux, mais parfois, on cherche à créer de tels «systèmes instables», lesquels ont d'autres avantages cachés, notamment en aviation.